D’un point de vue archéologique le commun des lecteurs non archéologues connaît la villa gallo-romaine – grâce aux découvertes de Roger Agache, il y a 40 ans -, parfois les fermes gauloises – voir la liste des sites découverts par les collègues en début de site -, mais l’oppidum est bien souvent le sujet d’une moue dubitative de la part du simple quidam.

Hormis les archéologues, peut de personnes imaginaient que les Celtes (nos braves gaulois mieux connus depuis les fouilles de Napoléon III à Alésia, et vulgarisés dans les manuels d’histoire comme des êtres indépendant et vivant dans des cabanes, rondes de préférence,  de torchis et de chaume)  avaient inventées des villes au plan beaucoup plus orthogonal que l’on se l’imaginait, regroupant dans leur enceinte une intense vie sociale représentée par de nombreux artisans, des lieux de cultes et l’endroit ou l’on battait monnaie.
 

    Tableau de 1870 d'Octave Penguilly l'Haridon, au musée d'Orsay
  Nous avons la représentation du brave "barbare" au pied de sa maison ronde, en torchis, recouverte de chaume. Là le peintre prends le parti  de la brave famille gauloise. Au premier plan, à droite, l'humble cabane gauloise témoigne des temps enfuis de l'indépendance. L'officier romain annonce au gaulois chevelu qu'il lui faut déguerpir sur le champ avec toute sa maisonnée, car la démolition de sa demeure est prévue dans un grandiose plan d'urbanisme.

Nous ne présentons qu'un extrait de l'œuvre qui fait en vérité 131 x 208 cm. La scène se passe dans la Alpes dauphinoises, chez les Allobroges

   
  Le terme d’oppidum est utilisé dans l’étude de la civilisation celtique suite au Commentaires de la Guerre des Gaules de Jules César.

Le rôle de l’oppidum est avant tout économique, l’endroit étant un lieu d’échange et le site pouvait servir, le cas échéant, de lieu de ravitaillement pour les armées gauloises. De plus, c’est sur les oppida que se prennent les décisions importantes de la noblesse gauloise. Il est donc certain que ces sites ont un aspect et des fonctions déjà urbains et César n’hésite pas à partir de 52 av. J.C. de les nommer urbs.

L’apparition et l’essor des oppida est caractéristique des IIe-Ier siècle av. J.C. La définition même de l’oppidum correspond essentiellement à cinq critères :
 
 
  • Leur superficie fait, théoriquement, un minimum d’une trentaine d’hectares.
 
  • Les sites sont généralement en hauteur, avec bien souvent une protection naturelle sous forme de vallées formant un éperon qui sera barré par une fortification élaborée (murus gallicus). Mais, depuis une trentaine d’années, des oppida de plaine ont été mis au jour (Beauvais, Epiais-Rhus, Levroux, Vaires-sur-Marne, entre autres).
 
  • Le contour du site est de préférence continu et ne tient pas compte obligatoirement du relief.
 
  • L’architecture du rempart est bien souvent la même d’un site à l’autre : un poutrage interne, un parement vertical externe et un une rampe à l’arrière.
 
  • Les portes sont bien évidemment en bois, formées d’ailes rentrantes (portes en tenaille)
 
    Le site d'Alyse-Sainte-Reine (Côte d'or)
 
 

D’une superficie de 90 hectares, le Mont Auxois est nationalement célèbre car cet oppidum fut l’endroit ou le destin de la gaule indépendante s’acheva. C’est à cet endroit que Vercingétorix se rendit à Jules César, après de violents combats et un siège de plus de 6 semaines en août-septembre 52 av. J.C. Les premières fouilles débutèrent à la demande de Napoléon III au début de 1861, alors que la controverse sur l’emplacement exacte de la bataille et du siège durait déjà depuis 1855. D’aucuns imaginent que c’est Badinguet qui « inventa » Alésia, mis le site était connu par les érudits depuis le Haut Moyen-Âge, puis par les Humanistes de la Renaissance et les Antiquaires du Siècle des Lumières. Un auteur (Franck Ferrand) se permet encore, en septembre 2008, de sortir un livre sur le sujet en « prouvant » que le site se trouve à Syam-Cornu-Chaux-des-Crotenay dans le Jura alors que l’ensemble des scientifiques français, européens sinon mondiaux est unanimement d’accord pour reconnaître Alise-Ste-Reine pour Alésia. En plus de quelques fouilles ou sondages depuis un siècle et demi, dirigées par entre autres par le colonel Stoffel, l’abbé Jovignot, Joël Le Gall, des fouilles archéologiques se déroulèrent dirigées par Michel Reddé aidé par les découvertes remarquables de notre maître René Goguey prouvant, grâce  à la prospection aérienne, la réelle existence du site, les fouilles concrétisant la véracité de ses clichés.
 

 

Le Mont-Auxois pris de 3 000 pieds. On aperçoit bien à droite, hors du rayon de soleil, la Montagne de Flavigny et la rivière Ozerain qui les sépare les deux ensembles tabulaires.

 

   
 

la circonvallation, à l’angle du camp C ou camp de Titus Labiénus, principal lieutenant de César, situé au nord-est du Mont-Auxois au lieu-dit Tourne qui vire.  Les quatre lignes parallèles, devant le fossé, sont les systèmes de pièges romains (cippi). Les quadrillages sur l’ensemble du cliché ne sont pas des cryoturbations (ou pergélisols) datant de la dernière glaciation mais des lignes de fracturation du banc de calcaire dur (la couche de terre végétale ne dépassant pas une quinzaine de centimètres)

[Cliché infra-rouge)]

   
 

vue des vestiges gallo-romain apparaissant le 20 août 2003 dans une jachère attenante aux fouilles

 

 
   Le site d'Angoulême (Charente)
 
  Le site d'Angoulême est trop représentatif, typologiquement, de l'image de l'oppidum  suivant la définition des archéologues pour ne pas figurer en tant que tel. Sur le Champ-de-Saint-Marsault (actuel Champ de Mars)  vers 1545, le maire  Hélie Dexmier  fit enlever plus de mille charretées de terres, pierres et pierrailles, probablement à l'emplacement d'un probable rempart protohistorique barrant l'éperon.
   
  De trop nombreuses découvertes protohistorique furent mises au jour depuis un siècle et demi, et pour finir, une fouille dirigée par Jean-Louis Destables, en 1992 permet d'envisager une occupation dès la fin de l'âge du bronze.
 
 
    Site de Bracquemont (Seine Maritime)
 
 

Lors de nos pérégrinations aéronautiques avec mon équipier Stan, il nous arrive d'aller  au bord de la mer qui est à une demi-heure de Pontoise. Là, plusieurs solutions: se poser sur le terrain de Dieppe, par exemple, ou nous avons des amis qui nous attendent et, bien évidemment, prendre de clichés des seuls monuments dument répertoriés : les oppida et les mottes castrales. La voie antique menant de Lillebonne  (Aquabonna) à Boulogne traversait le Champ-de-César, passait par le quartier du Pollet à Dieppe, Puys et Bracquemont à destination d'Augusta (Eu).
   
 

La forme triangulaire du camp couvre actuellement 52 hectares. Point de détail, le rivage avance de 20 m par an depuis 1830,donc la surface contenant des vestiges se réduit comme une peau de chagrin. La meilleure preuve en est qu'en 1826 au lieu dit les Câtelets,  P.-J. Féret a mis au jours les vestiges d'un fanum (temple) disparu avec un pan de falaise il y a plus d'un siècle.
 
   Site de La Cheppe (Marne)
 
 

Camp d’Attila. L’archéologue prospectant sur cette immense plaine ne peut éviter de survoler ce site  bordé par La Noblette se jetant dans la Vesle. Il suffit de suivre l’ancienne voie romaine à partir de Reims à destination de Bar-le-Duc, puis au sud-est de Mourmelon, à 5 minutes de vol,  cette structure subcirculaire, dans la plaine nous sert de point tournant (amer) remarquable.

Cette vaste enceinte de 30 hectares est entourée par une un rempart de terre de 7 mètres de haut, avec présence de fossés. C’est le vestige d’un oppidum du II è siècle av. J.C. réoccupé à l’époque gallo-romaine. L’ensemble des fortifications extérieures est recouvert d’une végétation luxuriante appelée, aujourd’hui, peut-être à disparaître dans la mesure où la commune semble vouloir mettre en valeur, pour le tourisme, le système défensif .

Pour des raisons qui échappent à l’entendement, des érudits, à partir du XVIIIe siècle voulurent y voir le Camp d’Attila, donc l’emplacement des Champs Catalauniques, lieu bien connu de l’Histoire de France ou les Huns furent défaits par le Patrice romain Aetius dirigeant une coalition gallo-romaine et de troupes fédérées (germaniques)  le 20 juin 451 ap. J.C. Napoléon III fit faire des fouilles, sans  compter d’autres recherches à la fin du XIXe siècle qui s’avérèrent stériles.
 

  Vue du site de La Cheppe
   
 

vue de l’enceinte de 7 mètres de haut avec son environnement boisé.

 

 
   Le site d'Epiais-Rhus (Val d'Oise)
 
  Vue de l'enceinte de l'oppidum de plaine d'Epiais-Rus, Val d'Oise. Vaste site gaulois de la fin de l'indépendance IIe-Ier siècle av. J.C. Dès 1984, Jean-Marie Lardy avait mis en valeur l'importance de ce site possédant des zones  bien définies d'artisans du fer, du bronze, et de céramistes. Un habitat structuré fut mis au jour. De plus, le site possédait un nombre de fana (temples) de tradition indigène important et de plus,  le site était pourvoyeur en monnaies gauloise de tout type dont dont un prototype directement émis sur le site (moules de potins découverts par un prospecteur clandestin.)
   
 

Ce qui nous désole à la vue de ce site, c'est qu'il est systématiquement pillé par des gens sans scrupules du Val d'Oise et de l'Oise. Des milliers de monnaies de bronze, de potin et des dizaines de statères (monnaies d'or) enrichissent ces clandestins et les marchands d'antiquité parisiens. La découverte des vastes fossés date des années 1990, avec confirmation en 2008. C'est la raison pour laquelle nous classons ce type de site  comme un oppidum de plaine.
 
 
    Site de Gouvieux (Oise)
 
  Le lieu-dit possède 3 noms : le Camp de César, Camp de Saint-Leu, Camp de Chaumont. Cet oppidum de 47 hectares est à ses débuts un camp fortifié du Néolithique chasséen, puis occupé au Bronze final III et pour finir une occupation de la Tène C-D.
   
  De 1974 à 1979  P. Rigault  de la S.A.H.G. a étudié la barre longue de 980 m et d' une largeur de 15 mètres en son centre. C. Masson qui l’a particulièrement observée sur 25 mètres de long a bien observé une levée de terre, des terres rubéfiées et la possibilité d’un murus gallicus.
 
    Site d'Incheville (Seine Maritime) - Camp de Mortagne  (28 ha)
 
 

Le Camp de Mortagne, domine la vallée de la Bresle au sud-est du village d’Incheville. Cet oppidum se trouve en limite du territoire des Ambiens et des Calètes appartenant sans doute à ces derniers. La superficie de ce camp avoisine les douze hectares ; un rempart de plus de 82 mètres de long (certains disent 344 mètres!?) barre l’éperon et l’isole du plateau au sud.

 
   
   
 
   Site de Paris
 
 

Sa surface originelle est d’environ 9 hectares. Depuis des siècles les membres des sociétés savantes, la commission du Vieux Paris, le Musée Carnavalet considéraient que l’oppidum des Parisii se trouvait dans l’Île de la Cité (Pilier des Nautes, nombreuses fouilles sous l’égide de Michel Fleury, entre autres crypte archéologique  au pied de Notre Dame). Mais depuis une trentaine d’années, plusieurs autres sites ont été évoqués en fonction des connaissances archéologiques accumulées et des emplacements géographiques plus adéquats à la définition d’un oppidum - St-Maur-des-Fossés (94), Nanterre (92)-. Quoiqu’il en soit de la recherche, notre cœur reste pour l’instant attaché à la cité, pourquoi ? Parce que c’est beau.

   
   
 
    Site de Pons (Charente)
 
 

Superficie de 100 hectares. La Dague est une éminence naturelle qui domine au nord-ouest la ville de Pons et culmine à 52 mètres de haut. C’est sur ce lieu qu’a été pressenti d’abord par l’abbé Julien-Laferrière (1879-1882) puis identifié vers 1960 par C. Gabet le seul oppidum de la Tène finale en Saintonge.

 
   
  L’oppidum avait une forme approximativement triangulaire, bordé sur deux cotés par la Seugne  et son affluent la Soute. L’éperon était barré sur son troisième côté par une levée fortifiée de 1 200 mètres de pierres et de terre. 
 
    Site de Saint-Léger-Sous-Beuvray (Saône-et-Loire)
 
 

Site plus connu sous le nom moderne de Mont-Beuvray ou Bibracte. Deux autres communes se partagent géographiquement le site : Glux-en-Glenne et Larochemillay, toutes les deux dans la Nièvre.

 Mais avant de parler de l’oppidum, le site est déjà inscrit dans l’histoire (surtout celle de Suisse) sous le nom de bataille de Bribracte. C’est à 25 km, au sud-sud-est de l’oppidum (Montmort en Saône-et-Loire) que César et Labiénus défirent une armée gauloise constituée avant tout d’Helvêtes, de Raurarques, de Boïens, de Latobices et de Tulinges au tout début de l’été 58 av. J.C. Cette coalition gauloise, dirigée par les Helvêtes, tentait d’émigrer en Saintonge. C’est à la suite d’une plainte des Eduens (nommés Frères de la République par le Sénat romain) que César utilisa ce prétexte pour « envahir » la Gaule.

Pour revenir à l’oppidum, celui-ci était la capitale des Eduens. Il culmine le paysage à 809 mètres sur près de 135 hectares (ce qui en fait le plus haut oppidum de France). Le site est entouré de l’Yonne, de la Loire et de l’Arroux .  Son inventeur, Jacques-Gabriel Bulliot (négociant en vin, mais d’une grande culture classique - grec, latin, rhétorique -), dès 1851, se lance dans l’étude du site. Napoléon III, en 1867, missionne ce dernier pour effectuer les premières fouilles sérieuses qu’il dirigera jusqu’en 1895, date à laquelle il confira les recherches à son neveu, Joseph Déchelette qui mènera encore 11 campagnes s’achevant en 1907. Le site tomba alors dans l’oubli jusqu’en 1 984 ou des recherches reprirent, à la demande du Président de la République, avec toutes les critiques possibles engendrées par certains chercheurs relayés par une presse quotidienne franchement hostile au projet. Depuis, le temps a fait son œuvre positive puisque de nombreuses équipes d’archéologues européens (selon les souhaits présidentiels) travaillent à des fouilles importantes chaque été, permettant de mieux appréhender la connaissance des oppida. De plus, un très beau musée a été créé sur place.
 

  Bibracte
   
  Vue planimétrique de type IGN, présentant l’emplacement de l’oppidum
   
  . Exactement le même cliché que le précédent mais sans la couverture forestière. L’oppidum et le site des sources de l’Yonne ont fait l’objet, au printemps 2007, d’un programme de recherches par le procédé LIDAR (Light Detection and Ranging), qui procède à une couverture aérienne photographique réalisée grâce à une télémétrie Laser emportée à bord du Cessna 172, à des altitudes ne dépassant pas les 2 000 pieds. Ce procédé, mis au point tout d’abord pour des études forestières, permet de mettre en valeur toutes les structures antiques et protohistoriques invisibles du ciel en raison du couvert forestier avec une résolution de l’ordre du mètre.
   
 

L’idée classique de l’oppidum est d’être barré ou entouré d’un murus gallicus, c'est-à-dire d’un repart constitué d’un enchevêtrement savant de troncs d’arbres calibrés, tenus entre eux par des clous de 30 cm de long pour 15 mm de section ,  le tout comblé par des blocs de pierre.  L’exemple présent est le résultat de fouilles de la Porte du Rebout à Bibracte. Les empreintes en creux sont la représentation en négatif des troncs constituant l’ossature du rempart.

   
 

le cliché représente la reconstitution parfaite d’une fortification celte - murus gallicus - Cet élément de fortification avec son parement bien achevé ainsi que son armature de bois bien visible tel que Jules César la décrit (avec admiration quant à sa solidité !) dans la Guerre de Gaules est le résultat final obtenu lors d’une reconstitution  en archéologie expérimentale dans les années 1985-90, sous la direction d’Olivier Buschenschutz, Jean-Pierre Guillaumet et Yan Ralston, à Bibracte.

 
    Site de Soyaux (Charente) - Plateau du Recoux
 
  SOYAUX : sur le plateau de Recoux existe un habitat fortifié formant un éperon  barré par une levée de terre. Dans un premier temps, à la fin du XIXè siècle, un habitat néolithique a été mis au jour (A. Favraud). Sur le site même, de la céramique de la Tène III aurait été ramassée.

Mais la caractéristique du site vient des fouilles - le Champ des Rochers- sur le versant nord-est qui se déroulèrent de septembre 2006 jusqu'au 16 novembre 2007  (sondages). Une vaste nécropole de l'Âge du bronze a été découverte sur les 20.300 m2, attribués à la recherche (nous avons survolé et photographié durant trois mois le site avec notre binôme Gérard Van de Zande).
   
  La grande particularité, c'est d'avoir mis au jour trois petits fosses circulaires alignées sur un axe nord-sud, positionnées à 3 mètres de distance chacune, les trois contenant le squelette d'un individu inhumé face à l'est, jambe gauche repliée sous le talon  amené sous les fesses et la jambe droite fléchie genou en l'air. Ce type d'inhumation très particulière rappelle les inhumations de la nécropole d'Acy-Romance (Ardennes) dont les résultats - à l'époque- firent sourirent de nombreux archéologues devant les résulats de notre ami Bernard Lambot.
 
    Site de Vernon (Eure)
 
 

Le Camp de César  ou Camp de Mortagne, d’une superficie de près de 80 hectares est un éperon barré, dominant Vernonnet, dans l’Eure. Il se trouve sur la rive droite de la Seine donc appartient probablement aux Veliocasses. Des fouilles importantes eurent lieu entre 1924 et 1928.

 
   
 

Une reprise de l’étude du site en 1992 a permis d’étudier le rempart et a prouvé l’existence d’un parement externe et d’un murus gallicus  attesté par de nombreux clous et d’un orifice témoin d’un passage de poutre dans le parement.